2024 : année de la prière #5

L’union au Christ – L’oraison ou prière silencieuse #1

Intro

Dans le dernier topo, je donnais quelques éléments sur l’adoration eucharistique, et dans la manière concrète de s’y prendre, je parlais de moments de prière silencieuse. Ces moments de silence qui nous sont probablement plus difficile dans des modes de vie très bruyants. Parce que dans les rues commerçantes, dans les supermarchés, dans les transports en commun, à la maison, partout on a du bruit, de la musique, des blablas…

Le silence est pourtant une condition primordiale pour entrer en intimité avec Dieu et développer sa spiritualité. C’est l’idéal de la prière : apprivoiser le silence extérieur pour goûter au silence intérieur, et ainsi goûter la présence de Dieu. Quand on a réussi à se familiariser avec la présence de Dieu et développer un silence intérieur, on peut se trouver dans n’importe quelle situation bruyante, la vie intérieure reste paisible et imbibée de la présence de Dieu. Le cœur et l’âme sont en harmonie parfaite avec lui.

Donc le but de toute notre vie est de demeurer toujours en prière. Pour que ça soit possible, on a besoin de temps gratuit avec Dieu qui permettent de vivre ce cœur à cœur. Le but n’est pas d’obtenir quelque-chose. Le but est un cœur à cœur gratuit pour qu’il nous transforme. La prière silencieuse qu’on appelle oraison est le mouvement de la grâce en nous.

Les premières oraisons

Quand on n’est pas familier de l’oraison et qu’on veut se lancer, pour les premières fois on commence par de la méditation. « Le sage médite les mystères divins. » Si 39,10

Au début de la vie spirituelle l’oraison est d’abord une forme de méditation. Le stade de la réflexion est un passage obligé dans l’oraison. Sinon on risque d’arriver dans le vide et dans l’orgueil. La méditation, c’est le travail de l’intelligence qui saisit le mystère de Dieu, en cherchant à le connaître à partir d’un sujet choisi d’avance:

  • Mystère proposé de la liturgie
  • Évènement de notre vie repris dans la prière devant le Seigneur

La méthode ignacienne propose d’utiliser l’imagination pour se représenter une scène de l’Évangile, pour en nourrir nos sens, s’approprier la scène pour voir ce que ça dit de la foi devant le Seigneur. Ça demande un effort, un travail.

Le fait de penser à Dieu fait entrer dans le sentiment qu’on est avec lui. Cette conviction intellectuelle a beaucoup de valeur et elle s’épanouit au contact de la Parole de Dieu (par la rumination de cette Parole).

La méditation fait chercher le sens, et l’âme va le goûter. Cette étape nécessaire prépare à la contemplation. Elle est un pont entre l’intelligence déficiente et ce que Dieu veut donner.

On éduque son intelligence à rentrer dans la pensée du Christ : Qu’est-ce que pensais Jésus ? Qu’est-ce qu’il voulait dire ? Le travail de l’entendement devient ensuite un obstacle à la vie mystique, car il cherche à comprendre, alors que Dieu ne se contient pas. Si l’intelligence ne lâche pas, la prière reste une spéculation qui empêche de prier.

Il s’agit donc de passer de l’intelligence au cœur (Hésychasme). Le but est bien de s’ouvrir à la présence du Seigneur. L’infini ne peut pas être saisi par l’intelligence, il peut seulement être pressenti. La véritable prière n’est qu’un acte d’amour, dans lequel l’intelligence a sa place.

Le déroulement de l’oraison

Je vais aborder ici le temps de prière en tant que tel, d’une manière assez concrète en rentrant dans le « pourquoi ». Ça concerne bien-entendu tous les moments de silence en général, mais plus particulièrement la prière silencieuse quotidienne qui se fait généralement le matin avant de commencer la journée et d’avoir la tête remplie de mille tracas.

Avant la prière

Une intime conviction est que si on a réellement pris la décision de se lancer dans l’oraison, le Seigneur nous attend dans ce rendez-vous quotidien ! C’est lui qui nous invite. Le refuser n’est pas un acte neutre. L’oraison, c’est vital !

L’oraison est une grâce, une faveur que Dieu nous fait car il vient nous visiter. Ça implique aussi un combat… parce qu’il y a toujours plein de raisons de ne pas la faire : pas le temps, trop de travail, pas d’énergie, quelqu’un de passage… Derrière ces excuses, il y a notre faiblesse encouragée par l’Adversaire, car il sait la valeur de l’oraison. L’Adversaire a horreur de la fidélité, il fera donc tout pour nous avoir par ce biais.

Il nous faut donc choisir une heure et une durée. C’est fixe chaque jour et on s’y tient, quitte à mettre le créneau « oraison » dans l’agenda ! Pour être fidèle, l’idée est de repérer l’horaire le plus favorable de la journée. Dans un premier temps, c’est une question de fréquence plus que de durée.  Le Seigneur attend de nous la fidélité et la régularité : « Par votre persévérance, vous obtiendrez la vie. » Lc21,19 Ne pas hésiter à prolonger parfois, sans paresse… c’est à vivre comme un entraînement, ça demande du courage. C’est donc tout à fait normal si on trouve ça difficile et fatiguant.

C’est important de choisir un lieu porteur, qui ne distrait pas, dans un silence extérieur qui favorise le silence intérieur. Ça passe aussi par le fait de préparer l’oraison, prendre sa Bible et lire avant, arrêter toute activité pour avoir l’esprit libre.

Le Début de la prière

Pour se mettre en présence de Dieu, il est bon de commencer par des signes :

  • Signe de Croix, qui nous ouvre le Ciel ;
  • Prendre un temps à genoux en signe d’humilité ;
  • Quand on s’assied, trouver une position confortable.

Puis faire silence en nous-mêmes en faisant l’effort de recueillir notre volonté :

  • Recueillir nos puissances en nous-mêmes ;
  • Nous mettre de nouveau en contact avec Dieu, dans une recherche active.

Parfois, Dieu fait le don de la paix c’est cadeau ! Et si on ne sent pas cette paix profonde, ce n’est pas grave, on est quand-même en sa présence…

Pour amorcer l’oraison, ça vaut le coup de reprendre un passage biblique. Cette parole permet une certaine distance qui centre sur Dieu et décentre de soi-même, on expose tout son être au regard de Dieu. Ce travail de recueillement est nécessaire, parfois violent, pour laisser de côté le bruit de notre journée. En fait, il s’agit de considérer comment Dieu nous regarde. On peut lui demander cette grâce d’être vraiment tourné vers lui.

Pendant l’oraison

On s’occupe du Seigneur en présence de qui on se tient :

  • Je me représente Jésus (raisonnement, imagination) ;
  • Puis, je fais taire mon raisonnement, je considère que Jésus me regarde, que je lui tiens compagnie ;
  • Selon la « météo intérieure », on peut adapter notre présence : en contemplant le Ressuscité quand on est dans la joie ou bien en contemplant Jésus à Gethsémani quand on est dans la peine…

L’idée est de s’aider de l’imagination comme levier, tout en ne restant pas trop longtemps sur ses considérations ! L’oraison ainsi vécue est l’exercice réel de la vie céleste, sous le voile de la foi. Cette prière fait entrer dans la vie trinitaire, elle nous identifie au Christ. On reçoit déjà l’héritage de gloire et de béatitude. C’est magnifique !

La fin de l’oraison

Il est bon de terminer l’oraison et de la vivre jusqu’au bout. Les jésuites conseillent de prier avec un chronomètre ou un compte à rebours pour ne pas se fier à ses impressions : « nous sommes l’argile, tu es le potier. » Is 64, 7 Il s’agit de donner à Dieu le temps nécessaire pour qu’Il nous façonne.

Et pour ne pas quitter la prière de manière brutale, on se trouve une petite liturgie de fin :

  • Un temps court d’action de grâce pour remercier le Seigneur pour le temps qu’il a donné, le remercier d’être avec nous ;
  • Terminer par le Notre Père, prière qui nous unit à l’Église, et qui universalise notre oraison ;
  • Marquer la fin de l’oraison par un geste corporel (le signe de croix, par exemple).

Juste après, on laisse remonter ce que l’Esprit Saint a inspiré, c’est le petit cadeau qu’on peut emporter dans le bagage pour la journée. Ça peut être un verset, une pensée, une considération qu’on va méditer toute la journée. C’est le pain que donne le Seigneur pour la route, le « pain quotidien » qu’on lui a demandé dans le Pater. Dans la méthode ignacienne, on est invité à prendre une résolution, même infime.

Et pour parfaire le tout, l’idéal est d’écrire cette pépite dans un carnet pour ne pas l’oublier dans la journée et pour pouvoir y revenir plus tard. Ce sont tous ces petits trésors qui permettent, à la relecture, de baliser un chemin que le Seigneur trace, un sillon qui permet de discerner sa présence, sa volonté.

Conclusion

L’oraison est une véritable école de vertu et de vie dans l’Esprit-Saint, je vous encourage vivement à faire cet exercice qui est une forme d’ascèse sur la longue route. C’est un véritable entraînement !

Un petit conseil pour ceux qui bénéficient d’un accompagnement spirituel, c’est de reprendre ce qui est vécu dans l’oraison, et de faire la synthèse des perles qu’on a récoltées.

Poème Jésus Seul. Sainte Thérèse de l’Enf. Jésus et de la Ste Face

Mon cœur ardent veut se donner sans cesse

Il a besoin de prouver sa tendresse

Ah ! qui pourra comprendre mon amour ?

Quel cœur voudra me payer de retour ? …

Mais ce retour, en vain je le réclame

Jésus, toi seul peux contenter mon âme

Rien ne saurait me charmer ici-bas

Le vrai bonheur ne s’y rencontre pas…

Ma seule paix, mon seul bonheur

Mon seul Amour, c’est toi Seigneur ! …

O toi sui sus créer le cœur des mères

Je trouve en toi le plus tendre des Pères !

Mon seul Amour, Jésus, Verbe Éternel

Pour moi ton cœur est plus que maternel

A chaque instant, tu me suis, tu me regardes

Quand je t’appelle, ah ! jamais tu ne tardes

Et si parfois tu sembles te cacher

C’est toi qui viens m’aider à te chercher.

C’est à toi seul, Jésus, que je m’attache

C’est en tes bras que j’accours et me cache,

Je veux t’aimer comme un petit enfant

Je veux lutter comme un guerrier vaillant

Comme un enfant plein de délicatesses

Je veux, Seigneur, te combler de caresses

Et dans le champ de mon apostolat

Comme un guerrier je m’élance au combat ! …

Ton Cœur qui garde et rend l’innocence

Ne saurait pas tromper ma confiance !

En toi, Seigneur, repose mon espoir

Après l’exil, au Ciel j’irai te voir…

Lorsqu’en mon cœur s’élève la tempête

Vers toi, Jésus, je relève la tête

En ton regard miséricordieux

Je lis : « Enfant, pour toi, j’ai fait les Cieux. »

Je le sais bien, mes soupirs et mes larmes

Sont devant toi, tout rayonnants de charmes.

Les séraphins au Ciel forment ta cour

Et cependant, tu mendies mon amour ! …

Tu veux mon cœur, Jésus, je te le donne

Tous mes désirs, je te les abandonne

Et ceux que j’aime, ô mon Époux, mon Roi

Je ne veux plus les aimer que pour toi.