2ème dimanche du Carême année B 2024

Chers frères et sœurs,

En redécouvrant le récit du sacrifice d’Abraham, j’ai pris conscience que Dieu lui a explicitement demandé de lui offrir Isaac en holocauste. Ce n’est pas rien de formuler une telle demande !! Le mot holocauste a une racine commune entre le latin et le grec, il signifie : « sacrifice brûlé ». Dans l’Antiquité, on brûlait intégralement une victime vivante pour apaiser les dieux. À travers cet épisode de la Gn, Dieu interdit les sacrifices humains. Pour autant, l’holocauste chez les hébreux reste un des modes de sacrifices parmi d’autres, un sacrifice spécifique, car la victime animale est brûlée intégralement pour le pardon des péchés. C’est donc un sacrifice qui est offert de manière occasionnelle.

Dans les autres formes de sacrifices, on brûle seulement une partie de l’offrande, et le reste est réservé aux prêtres. Alors, pourquoi Dieu demande-t-il un holocauste à Abraham ? J’y vois deux raisons. D’abord pour montrer qu’il attend qu’on lui donne tout, vraiment tout. Et puis aussi pour montrer qu’il est prêt à pourvoir lui-même à ce sacrifice en se donnant totalement en Jésus-Christ. Alors pour cette 2ème semaine de carême, maintenant qu’on a terminé l’échauffement, on peut se demander comment tout donner au Seigneur. Réponse en 3 points pour reprendre les caractéristiques de l’holocauste dans l’AT.

  • Une offrande totale

Dieu attend une offrande vivante tout entière, l’offrande de nous-mêmes. En ouvrant le CEC, on peut voir que ça concerne surtout deux aspects de notre personne :  l’agir qu’on appelle « vie morale » en théologie, et la prière. « La vie morale est un culte spirituel. Nous  » offrons nos corps en hostie vivante, sainte, agréable à Dieu « , au sein du Corps du Christ que nous formons, et en communion avec l’offrande de son Eucharistie. » CEC 2031 et justement, la prière elle aussi est comparée à l’Eucharistie : «  » rassembler  » le cœur, recueillir tout notre être sous la mouvance de l’Esprit Saint, habiter la demeure du Seigneur que nous sommes, éveiller la foi pour entrer en la Présence de Celui qui nous attend, faire tomber nos masques et retourner notre cœur vers le Seigneur qui nous aime afin de nous remettre à Lui comme une offrande à purifier et à transformer. » CEC 2711 L’offrande totale de soi-même se fait très concrètement quand on agit selon l’éthique chrétienne et quand on prie. C’est à la fois très simple à mettre en œuvre et très long à comprendre…

  • Une offrande par le feu

Dans la spiritualité chrétienne, on peut dire que le feu, c’est l’Esprit Saint. Il est celui qui permet à la fois de recevoir Dieu tout entier et de s’offrir à lui. Pas de feu, pas d’holocauste ; pas d’ES, pas d’offrande totale. C’est pour ça que Dieu veut ardemment nous donner l’ES en abondance. St Paul écrit dans la 2ème lecture : « comment pourrait-il, avec lui [Jésus-Christ], ne pas nous donner tout ? » Probablement en référence à la parole même de Jésus dans l’Évangile qui nous demande de réclamer : « Si vous qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père du Ciel donnera-t-il l’Esprit-Saint à ceux qui l’en prient ? » Lc 11,13.

L’Esprit Saint est ce lien d’amour entre le Père et le Fils. Il est un lien tellement important qu’il en est une Personne. Et dans son dessein bienveillant, dans la perfection de sa Création, Dieu veut nous faire entrer dans cette relation amoureuse. L’Esprit-Saint est ce feu qui nous purifie et nous introduit dans la communion trinitaire, dans le cœur de Dieu.

  • Une offrande pour le pardon des péchés

La grande offrande de soi-même pour le pardon des péchés, c’est un sacrement qu’on ne vit qu’une seule fois dans son histoire : le baptême ! Mais comme on n’est pas encore parfait, malgré tous les efforts qu’on peut faire pour essayer de le devenir, on a une tendance au mal, une inclination au péché. On a d’ailleurs cette belle petite expression du livre des Pr 24,16 : « Car le juste tombe sept fois mais se relève. » Comme le baptême est un peu dur à vivre, le Seigneur nous a donc offert de quoi retrouver la grâce baptismale, un sacrement tout spécial qui porte le nom savant de « sacrement de pénitence et réconciliation » ; plus connu sous le nom de confession. C’est une manière de revenir humblement vers le Seigneur, de se laisser relever et réconforter par lui. On y fait le sacrifice de son orgueil en déposant tout ce qu’il y a de plus laid en soi, et en échange, Dieu nous donne la grâce de retrouver notre habit lumineux de chrétien qu’on a reçu au baptême. C’est en quelque sorte l’expérience de la Transfiguration qu’on vit en son âme.

Conclusion

Tout donner à Dieu, c’est le travail de toute la vie… Le moment où on va totalement tout donner à Dieu, c’est en entrant dans la vie éternelle. Mais en attendant, on peut déjà commencer petit à petit. C’est de la pédagogie divine que d’être progressif. D’ailleurs, quand on lit entre les lignes, Dieu annonce tout ! Dans l’épisode du sacrifice d’Abraham, il annonce déjà la crucifixion et mort de Jésus ; dans l’épisode de la Transfiguration, il annonce déjà Pâques, la Résurrection… Dans les promesses de Dieu, il y a toujours quelque chose qui est déjà en train de s’accomplir, mais qui n’est pas encore achevé. Et c’est le cas dans l’Eucharistie notre modèle par l’offrande du Christ au Père. On a un petit bout de vie éternelle qui est déjà presque là, mais pas encore tout à fait. Dans ce sacrement de l’Eucharistie, on s’associe progressivement au sacrifice du Christ dans les offrandes du pain et du vin auxquelles on ajoute l’offrande de nos cœurs.

Cette semaine, essayons de concrétiser l’offrande de nous-mêmes dans la prière quotidienne, dans la vie de charité, et en se rapprochant de l’Eucharistie. C’est peut-être aussi l’occasion d’offrir au Seigneur une belle confession, les propositions ne manquent pas dans la paroisse et à proximité. Profitons de cette semaine pour faire un pas de plus dans l’offrande totale de nous-mêmes au Seigneur.

Amen.