Homélie des rameaux
Étonnant mouvement de foule… Jésus, personnage politiquement incorrect aux yeux des dirigeants, attire beaucoup. Il est très attrayant par sa réputation, par son côté original, par ce qu’il transmet… et la foule attire la foule… Quand on voit quelqu’un regarder en l’air, on regarde aussi, par réflexe. De même, quand on voit un attroupement, on jette un œil pour « voir ce qu’il se passe ». C’est peut-être le cas d’une partie d’entre nous ce matin. Bienvenue à ceux qui rejoignent l’attroupement des chrétiens, à ceux qui ont entendu qu’on pouvait faire bénir du buis et trouver une protection spirituelle avec un moyen temporel.
La question qu’on peut se poser, derrière la curiosité, c’est celle de la foule à Jérusalem : « Qui est cet homme ? » Qui est Jésus ? On a probablement tous une idée de qui il est en fonction de nos croyances, de notre éducation, de nos expériences… En tout cas, ce qui fait l’unanimité, c’est la réponse que les uns et les autres se glissent à l’oreille : « C’est le prophète Jésus… » Tu sais, Jésus… Jésus, personnage historique qui a marqué le monde entier, à tel point qu’on a basé notre calendrier sur le jour de sa naissance, à tel point que dans notre pays, on retrouve une église dans chaque village, et dans chaque quartier des grandes villes… Le prophète Jésus ! Et quel genre de prophète ? Qu’est-ce qu’on entend par « prophète » aujourd’hui ?
Le prophète est peut-être celui qui annonce quelque chose, qui a un don particulier, celui qui est ouvert à une dimension spirituelle qu’on n’a pas… D’où les acclamations de la foule : Hosanna ; ce qu’on pourrait littéralement traduire par : « Sauve, de grâce ! »
De quoi a-t-on besoin d’être sauvé aujourd’hui ? En cette période de grogne sociale, de précarité, de troubles, on attendrait bien un prophète ! Et pour celui qu’on acclame en ce dimanche, à quelle foule ressemblons-nous ?
Serons-nous de cette foule qui regarde passer l’attroupement en se réjouissant un instant ? Cette foule qui acclame maintenant, et condamne après la même personne sous l’influence de quelques-uns ? Ou bien sommes-nous des disciples attachés à Jésus, les inconditionnels en quête profonde d’une relation d’amitié véritable avec Dieu ?
En s’avançant vers l’autel avec nos rameaux, prenons le temps de bien saisir le sens de la procession. Ne nous trompons pas de combat. Le nôtre est en vue d’une réalité bien plus grande que ce qu’on imagine. Notre Prophète est bien plus qu’un intercesseur… Puisse chaque pas qui nous rapproche du lieu de culte, manifester un pas intérieur qui nous rapproche du Rédempteur, et de son amour puissant et débordant qu’il a pour nous.
Amen !
Homélie de la Passion
Dimanche dernier, dans l’Évangile de la résurrection de Lazare, un verset m’a particulièrement bouleversé : « Ils lui répondirent : « Seigneur, viens, et vois. » Alors Jésus se mit à pleurer. » Ce petit verset qui fait écho aux disciples de JB qui rejoignent Jésus. Souvenez-vous : « Ils lui répondirent : « Rabbi – ce qui veut dire : Maître –, où demeures-tu ? » Il leur dit : « Venez, et vous verrez. » Ils allèrent donc, ils virent où il demeurait, et ils restèrent auprès de lui ce jour-là. » (Jn1,39)
Qui peut parler de cette manière ? Très peu de discours, une invitation à l’expérience, des émotions fortes… C’est tout simplement un dialogue entre amis, entre amis véritables ! Et ce qui marque particulièrement cette amitié, c’est la réciprocité de l’échange. Jésus appelle les disciples à venir faire l’expérience de le suivre ; et ses amis, à leur tour, l’invitent à faire l’expérience de leur peine, de leur tristesse. Dans les deux sens, l’expérience est bouleversante ; à la fois pour les disciples, et pour Jésus.
Si je fais cette digression en parlant de ces passages qui n’ont rien à voir avec ce qu’on vient d’entendre, c’est qu’on est invité à faire cette même expérience aujourd’hui. L’Évangile de la Passion, du procès de Jésus, de sa condamnation et de sa mort, n’est pas un passage agréable à écouter. D’abord parce que c’est très long, et puis il faut reconnaître que ça plombe l’ambiance. On a commencé sous le signe de la fête en acclamant le Messie, et là, on le met à mort par la torture… Ascenseur émotionnel.
Peut-être que justement, ce qu’on peut vivre aujourd’hui, c’est ce « viens et vois » réciproque. On s’est réunis dehors pour manifester notre enthousiasme au Seigneur : « Viens Seigneur bénir nos rameaux, regarde la joie qu’on a de t’accueillir ! » Et lui nous réunit ici : « Viens mon ami, écoute le récit de la Passion et comprends jusqu’où va mon amour pour toi ! »
Plus qu’une reconstitution historique ou théâtrale, cette messe des Rameaux et de la Passion est un cœur à cœur, un échange d’amitié profonde, elle est l’occasion de renouveler ce lien intime qu’on a chacun avec le Seigneur, pour se préparer à la Semaine Sainte, centre névralgique de notre année liturgique, et pivot de notre foi.
Frères et sœurs, mettons tout en œuvre pour découvrir ou redécouvrir l’amour que Dieu a pour chacun de nous.
Amen.
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